vendredi 13 mars 2015

Rallumez les lumières


Syrie
Quatre années. Quatre années enragées à vénérer la haine la servir l'exalter quatre années de corps en charniers entassés déchirés gazés brulés violés percés découpés annulés quatre années du règne de l'obscène hors des chemins de l'humain pas dans la folie non pas dans la folie mais loin de tout ce qui vit veut vivre quatre années de larmes séchées par la terreur de terreurs éreintées avec la mort au bout quatre années à regarder le monde ne pas vous regarder ou vous regarder et vous nier ce qui revient au même quatre années de poussière  rats  ventres desséchés vermines gravas sur les gravas sang noyé dans le sang et encore et encore et encore et encore sang sur le sang sang sous le sang quatre années d'écoles dévastées saccagées abolies d'enfances volées piétinées enterrées interdites quatre années de mères touchées à l'âme d'enfants seuls errants à devenir fous oui tous fous quatre années d'exils fuites cris appels au secours fuites encore refuges indignes famines misères au delà des misères quatre années de barils perçant un ciel meurtri quatre années d'insultes en surenchères d'impunité lignes rouges négations brisures à l'âme méthodiques conscientes volontaires jouissives viens que je te tue mon frère que je te tue lentement que ton corps implose tu vas hurler de peur et de mal et je vais exulter quatre années à trouer la mémoire pierres sur les pierres qui ne parleront plus quatre années à étouffer le désir du désir de liberté rosser l'envie d'aimer jouir de la discorde exploser les élans défoncer la fraternité arracher l'espoir sous les ongles
quatre années sans souffle
quatre années sans souffle
quatre années pour éteindre les lumières de la terre de Syrie

La douce la bleue la magique
Terre du matin unique

Quatre années à fendre la nuit mon courageux mon ami mon frère ma lumière
Je t'accompagne
A Yasser.

Marion Coudert

jeudi 29 janvier 2015

Vous pouvez voir une partie de notre travail sur la Syrie et le Liban notamment sur le site http://www.collectifterritoires.com/fr/projets


Noria Al Salam,  réalisée pour  l'Expo Internationale Zaragoza 2008-Espagne

lundi 12 janvier 2015

De l'amitié entre les peuples... et de la responsabilité...


Affiche@Nicolas T. Camoisson, mars 2012
Lettre ouverte à l'association Souria Houria et à ses amis,

L'amitié entre les peuples se construit chaque jour de ces amitiés particulières...
Aucun appel à la solidarité ne peut être entendu s'il n'a pas pour fondement la volonté d'une avancée commune et d'une réelle fraternité.

Je suis libre et, en écrivant aujourd'hui, je continue à exercer mon droit à la liberté d'expression. Ne devons-nous pas le défendre, ce droit, plus que jamais ?

Depuis le début du soulèvement syrien, je me suis levée à ses côtés et j'ai créé ce blog. C'était ma façon à moi, citoyenne française, d'être, tous les jours, auprès de mes amis syriens contre la barbarie. Un travail quotidien que j'ai mené sans penser à autre chose. Une folie pour ma vie personnelle... Mais une folie à la mesure de l'amitié qui me lie au peuple syrien. Et un devoir. Un devoir d'engagement. Ni plus ni moins.

La seule démarche qui fut la mienne, dans le cadre de ce blog, a été de me tenir à vos côtés en dessinant les fils de l'humanité de votre peuple, en montrant la beauté de votre pays, la douceur et la fraternité qui vous habitent, malgré les affronts de la barbarie. Au-delà de mon blog, vous le savez aussi, bien avant la révolution de 2011, il y a eu une noria de Hama au nom Al Salam, la Paix, qui honorait votre peuple à l'Exposition Internationale de Zaragoza 2008 et puis des expositions, des ouvrages dont Le Sang du Printemps etc etc... (lisez le blog...)

Cette démarche, toute poétique qu'elle soit, est profondément politique. Les lectures nombreuses de mon blog, en France mais aussi dans divers pays dans le monde, attestent de sa faculté de rassembler et de questionner au-delà des appartenances. Ce blog toujours qui, depuis mon silence en avril 2014, continue d'être lu a donc quelque utilité... Et s'il n'en n'avait qu'une seule, elle est infiniment précieuse : nommer l'espace commun entre nos sociétés, nos cultures, nos humanités...

N'est-ce pas là l'essentiel à redire toujours contre la barbarie ?

Si j'ai pu le faire, si j'ai voulu le faire, c'était grâce à cette amitié, ces amitiés particulières avec Yasser, Azzam, Fayçal, Khaled, Naïm, Ahmed... L'amitié entre les peuples, ce n'est pas autre chose que ça : une histoire de rencontres et de reconnaissances, une même vision où les rires s'emmêlent, un sens du partage, une ouverture, un don, un échange de savoirs, un enrichissement...

Et puis je me suis tue, épuisée de trop de violences faites à votre peuple, et d'avoir à me battre, par dessus le marché, contre votre indifférence et votre manque de fraternité. Je me suis souvent interrogée sur la raison de ce déni. Pas assez bien pour vous ? Trop amoureuse de la Syrie ? Pas assez politique ? Pas assez d'entre-gens ? Trop "électron libre" ? Trop ?  Pas assez ? Quoi ?

Pourtant - déni toujours - vous avez soutenu et honoré le projet 1001 cartes pour les enfants de Syrie que nous avons imaginé, conçu et impulsé avec Nicolas Camoisson, français mais bien enfant de Syrie lui aussi... Parce que oui les enfants de Syrie, aujourd'hui et depuis le départ ça nous broie le coeur...
Pourtant, depuis le départ, vous indiquez sur votre site mon blog dans les "sites syriens"...
Et que dire aussi de votre absence à l'Iremmo en mars 2013 lors de notre exposition sur les artisans des pneus d'Alep ? N'êtes-vous pas du quartier ?...

Et puis, je me suis dit, dans la foulée de cela, que je ne devais pas être la seule.
Nous sommes déjà si peu nombreux à nous lever pour le peuple syrien, et vous avez raison de dénoncer le silence et l'indifférence. Mais combien sommes-nous à traverser en plus le déni de ceux qui, en France, représentent la défense du peuple syrien ? Comment comprendre cet accueil sélectif de la solidarité ?

Le silence répare. Et je me suis réparée parce que j'ai fait face à ma fragilité. Et je revendique ce droit-là : celui d'être faillible. Nous le sommes tous. Avez-vous toujours été des héros ? Ne flanchez-vous jamais ? N'avez-vous jamais besoin des autres ?

On appelle à l'unité aujourd'hui en France, face aux fous, aux criminels, à l'obscurantisme.
On défile, c'est historique, un merveilleux instant de fraternité... Mais demain ? 
L'Europe se replie, les haines à venir jubilent déjà du formidable champ à explorer dans nos pays dits libres. Déjà le mot "amalgame" a pris le pas sur celui de "fraternité" et si nous sommes tous inquiets c'est parce que nous savons très bien que la corde est plus que jamais tendue entre les communautés et que le fameux "vivre ensemble" a une odeur de soufre depuis un moment déjà.
Alors voilà, les enjeux sont importants aujourd'hui  : avancer ensemble ou choisir de ne pas être une force. 

Je n'écris pas pour moi. J'ai pris mon parti de tout cela. La Syrie est dans mon coeur et rien ne peut changer cela.
Mais j'écris pour ceux qui viennent à vous avec ce qu'ils sont, juste pour être avec vous. Et j'écris pour vous. Vous qui défendez si vaillamment la liberté et la dignité du peuple syrien. Et je prends la liberté de vous interpeller car c'est de votre responsabilité de ne pas négliger, de soutenir et de ne pas exclure des citoyens comme nous, simples mais engagés, et avec une voie qui a su porter et porte encore.

Marion Coudert.

mercredi 8 octobre 2014

Salon du Livre Francophone de Beyrouth

Pays, Chroniques d'un Orient fragile et Le Sang du Printemps seront présents au Salon du Livre Francophone de Beyrouth, du 31 octobre au 9 novembre 2014, sur le stand de la librairie El Bourj.




Librairie El bourj
Place des Martyrs
Imm. An Nahar,
Beyrouth – Liban

samedi 26 avril 2014

Un pays



Hamza avait treize ans. C'était un 27 mai 2011. Ce jour-là, le corps du petit garçon était rendu à ses parents gonflé de tortures, ravagé de souffrances. Treize ans en Syrie, pour un petit garçon, c'est l'âge du beau passage, les deux pieds dans l'enfance à regarder vers la vie d'homme. Et puis à treize ans, quelle que soit la terre où l'on a vu le jour, on est encore un enfant, avec les rêves d'un enfant, les rires d'un enfant, les élans d'un enfant. Ce 27 mai 2011, dans les rues du pays, deux images d'Hamza ont circulé, tendues par des mains indignées qui réclamaient justice. Deux images : celle d'un gosse au regard doux, un gamin du pays et celle d'un corps méconnaissable de violences, comme sorti de lui. C'est comme ça que le monde entier a découvert l'existence de ce petit garçon simple de Deraa. Durant deux ans, des milliers d'enfants syriens ont rejoint Hamza et ses yeux privés de vie. Ils ont pris ce même chemin sous l'amoncellement des gravas de leurs maisons, victimes des balles des snipers, dans la solitude immense des tortures, fauchés par des massacres fous ou endormis, lâchement, par des gaz meurtriers. Avec le regard d'Hamza, résonnent encore les chants, courageux entre tous, d'un peuple qui a cru au bonheur nouveau, à la fierté légitime, à la liberté essentielle, à l'espoir pour ses enfants.  Ensuite, tout se perd dans le mouvement éteint des enfants, dans l'immobilité figée, rivée au sang des jours de guerre. Et les jeux de dupes s'installent. Et tout est frénésie rageuse, courses à l'analyse, opinions sans fin, si queue ni tête. Qu'importe, la guerre avance, sauvage chaque jour un peu plus, dévastant, annulant. Irez-vous ? Pas ? Quoi d'autre ? Peut-être alors déjà ceux des enfants qui restent, embourbés sur les chemins de l'exil, blessés profondément dans les ruelles des crimes, brisés à l'âme de tant de fureurs. Ceux-là, les veiller, les aimer, leur prodiguer tous les soins de la terre de tous les coins de la terre. De l'amour pour eux.  Les emmener, chacun d'entre eux, vers des espaces où le souffle est possible. Et l'espoir.
Là où le pays et la main se rejoignent.
Là où les loups ont déserté.
Un pays.
Celui d'Hamza.

Marion Coudert.

mercredi 23 avril 2014

France terre d'accueil ?

Son prénom et son nom ne feront pas la une des journaux français. Pas de tarmac ni de discours pour cette petite fille syrienne, échouée chez nous, sauvée d'une guerre dont elle a été, elle aussi, l'otage.  On ne fêtera donc pas l'arrivée de cette enfant en France. Pour elle, un parc dans la banlieue parisienne en journée et l'incertitude, chaque jour renouvelée, d'une nuit dans un hôtel. Ou pas. Pas d'école non plus. Mais une attente indigne. Et le silence. 
Quelle que soit l'issue que nous écrirons pour les réfugiés syriens de Saint Ouen, il faut se rendre à l'évidence que notre pays et ceux qui le conduisent, piétinent sans scrupules ce qui est inscrit dans la déclaration des Droits de l'Enfant. Et que c'est là une signature de plus de la fin d'une tradition, de plus en plus mensongère, de plus en plus abstraite, d'une France qui serait terre d'accueil. 
Parce que cette enfant n'est pas une abstraction. L'image ne nous arrive pas de son pays que nous pensons lointain. Elle est prise au coeur de nos villes. Elle est une réalité, la preuve de notre sècheresse.
Marion Coudert

Petite fille syrienne dans le parc Edouard Vaillant - Saint Ouen- France- Photo © Krica- 22 avril 2014

vendredi 18 avril 2014

Soixante

©Marion Coudert
Pas de poésie. Des chiffres. Absurdes. Des vies derrière.  
Ils sont soixante. Nous sommes soixante-cinq millions. 
Soixante personnes échouées dans un parc.
Le parc est rue Suzanne Valandon à Saint Ouen. 
L'information est précise. Connue donc. Il y a des hommes oui mais ce sont surtout des femmes et des enfants. Quelles que soient leurs histoires individuelles, tous ont traversé déjà trop de souffrances. Nous le savons. Et ce n'est pas compliqué de faire un pas de côté, le temps d'une minute à y penser, pour s'imaginer à leur place, fuyant la rage profonde qui détruit leur terre depuis trois ans. Inutile de s'appesantir à nouveau à décrire la guerre, le quotidien, le ciel syrien plombé de foudres, les destructions, le feu, les charniers, la frayeur. Inutile. Nous savons. 

Autour d'eux, des gens se pressent. Des Syriens, des Français. Des associations, des particuliers.  Mais qu'importe. Ce sont des gens que cela touche et indigne, cette grande solitude. Et c'est assez pour les faire agir. 

Nul ne peut ignorer la loi. Nul n'ignore non plus les lourdeurs administratives. Des chiffres encore pour des dossiers. Mais des vies derrière toujours. Et en attendant la réponse aux statuts et que lois et cotas entrent en scène, un jardin public. Comme une insulte.

Il y a quelques jours, un homme s'est dressé à une tribune. Avec des accents de jour de grand oral, il a posé, comme un socle, la fierté fondatrice du chemin parcouru de la Rambla catalane au 57 de la rue de Varenne. Belle tribune. Unique pour redessiner une certaine image de la France et maintenir le mythe. Parce que c'est ça notre pays : une terre d'accueil, chantre des droits de l'homme. Ce mythe qui semble étouffer aujourd'hui les débats au point de laisser libre cours à des dérives politiques paranoïaques qui s'ancrent dans nos villes au nouveau visage inquiétant. 

Peu après cette levée de mots largement commentée, il y a eu un autre homme, à une autre tribune. Une tribune discrète et un homme assis, le visage fatigué mais la présence forte. Et sincère, simple.  Salam Kawakibi, à Bordeaux, a déconstruit le mythe et situé l'espoir, les possibles, là où ils se trouvent : dans la société civile, les sociétés civiles. nationales et internationales. C'est vous, c'est moi, c'est nous. Pas d'autres issues. Pas celle, en tout cas, d'une tribune haut perchée qui mettrait en actes les paroles. 

Ce constat posé que toutes les tribunes n'appliquent pas les mêmes règles du jeu, les dès sont lancés. Pour une partie qui définira ou non nos responsabilités.
Car nous savons. 

Marion Coudert




jeudi 17 avril 2014

Un grand merci à vous tous, présents à la librairie Caractères de Mont-de-Marsan ce jeudi 10 avril. Pour la qualité de votre écoute et pour cette pensée que nous avons eu ensemble pour les enfants de Syrie, pour cette terre dont nous devons toujours continuer de parler avec douceur. Merci à Carlton Rara pour sa bienveillance, l'intelligence de ses questions, la chaleur de sa voix. Belle rencontre! Et un grand merci à Anthony de la librairie Caractères car c'est bien plus qu'une librairie, c'est un vrai lieu de rencontres et d'échanges, un lieu pour grandir et s'enrichir !

Petit artisan des pneus - Alep - Syrie

jeudi 3 avril 2014


Merci à tous les amis présents hier à la librairie 100 Papiers pour la signature. C'était un joli moment.  Et nous avons pu parler de la Syrie comme j'aime, en douceur et dans un lieu bienveillant et chaleureux. Merci !


vendredi 28 mars 2014

Le 12 avril à Bordeaux

Oeuvre d'Hazar Bakbachi
Le samedi 12 avril, je serai à Bordeaux pour une journée de solidarité pour la Syrie.

j'y présenterai mon livre Le Sang du Printemps, un blog pour le peuple syrien et en lirai quelques extraits.

Amis bordelais et d'Aquitaine, vous y êtes les bienvenus.

Lors de cette journée, vous pourrez écouter les lectures du comédien et metteur en scène Wahid Chakib (http://www.wahidchakib.com/index.html).

Vous vibrerez, c'est sûr, au son des mélodies de Nawras Ibrahim et Yanal Ataiti qui interpréteront des musiques traditionnelles alépines (https://www.youtube.com/watch?v=IVLyqmiUJts).

En déambulant, vous découvrirez les oeuvres de Ahmad Almanci, Yassin Kasmi et Hazar Bakbachi.

Et puis, à 16h, vous aurez la chance de faire un pas vers une meilleure compréhension de la situation politique en Syrie avec Salam Kawakibi, directeur adjoint de l’Arab Reform Initiative et de la situation humanitaire avec les représentants de CODSSY (http://codssy.org/).

Enfin, vous approcherez la douceur de la Syrie en dégustant les mets du buffet qui vous y attend. 


Cette journée est organisée par Hazar Bakbachi, avec la participation de Souria Houria et Codssy. 
venez nombreux de 14h à 20h au cinéma Jean Eustache de Pessac.

Quelle victoire ?

Bimaristan Argoun - Alep - Syrie ©Nicolas T. Camoisson
Parce qu'ils ambitionnent de soumettre la terre et le peuple. Parce qu'ils brûlent tout, s'acharnent, jouissent des ravages qu'ils orchestrent. Parce qu'ils n'ont qu'un langage de sang et de fureur. Parce qu'ils ont choisi de posséder au lieu de partager. Parce qu'ils n'ont d'autre vision que celle du chaos qu'ils déroulent sans fin. Parce qu'ils ne se définissent plus qu'en seigneurs mortifères, régnant sur les cendres d'un avenir qu'ils renient. Parce qu'ils veulent la peau de leur terre, et qu'ils la noieront, s'il le faut, dans la boue de leur folie. Parce qu'ils veulent la peau de leur peuple. Jusqu'au dernier homme libre. Jusqu'à la dernière femme debout. Jusqu'au dernier enfant qui s'éveille. Parce qu'ils ont fait le choix de la nuit.
Parce qu'ils ont imposé la nuit, ils nous privent d'une terre et d'un peuple. C'est une violence moindre et sans comparaison à ce qu'ils échafaudent pour hisser leur drapeau.
Mais c'est violence aussi.
Interdites, les berges du Barada. Hors d'atteinte, la majesté des matins de Tadmor. Empêché, le souffle court sur les marches de Bosra. Censurée, l'histoire à parcourir dans les pénombres du Krak des Chevaliers. Condamnées, les marches chargées de tous les brassages dans le souk d'Alep. Fantôme désormais. Prohibé, le chant des belles, des nobles roues de l'Oronte. Révoqué, le jasmin délicieux dans les rues damascènes.

Et parce qu'ils tuent chaque élan libre qui s'élève. Parce qu'ils étouffent tous les chants de la vie, ils nous privent d'un peuple, de la beauté d'un peuple. Ils nous interdisent cette rencontre qui, loin de nous diminuer, nous grandit et nous irrigue. Ils pensent qu'ils nous blessent. Ils savent qu'ils nous blessent. Ils veulent nous atteindre, ferrer notre silence. Ils croient en la force de l'habitude. Ils croient tenir là leur victoire, plus sûre à chaque jour meurtri.

Mais ils s'aveuglent. Ils ont perdu. Ils sont perdus.
Ils ne pourront jamais briser l'élan de la mémoire.
Ils ne pourront jamais faire plier sous leurs feux la puissance exemplaire de ceux qui ont marché.
Tous ceux qui sont morts.
Tous ceux qui ont disparu.
Tous ceux qui ont résisté.
Tous ceux qui résistent encore.
Tous ceux-là, mémoire et force pour demain.
Et levier.
Et victoire.

Marion Coudert

vendredi 21 mars 2014

Un jour pour les mamans de Syrie

Dame d'Alep-Syrie. ©Nicolas T. Camoisson
C'est la fête des mères en Syrie aujourd'hui. 
Un jour pour les mamans.
Une journée dans l'année.

Une maman. 
Peu de mots nous réunissent comme celui-ci.
Quels que soient nos horizons, ce mot nous désarme. 
Et nous ramène à ce que nous sommes. Intimement. Au-delà de tout. 
Car tout s'envole avec lui. De nos identités, de nos haines, de nos cloisons.
Que nous soyons d'un clan ou de celui qui lui fait face.
Et de ces rives noyées de sang ou de celles des quotidiens paisibles. 

Une maman. 
Évidemment, ce mot-là ne trouvera jamais sa place sur une table où l'on négocierait.
La guerre est une affaire sérieuse. Il est question de force, de stratégies pour la puissance, d'arithmétique pour écraser, gagner, blesser l'autre, l'annuler.
Oui la guerre est une affaire sérieuse et ces histoires-là sont affaires de bonnes femmes, de divan très cher payé pour pallier, dans le secret, de ces fragilités inavouables ou de poètes au coeur trop tendre.
D'ailleurs on ne négocie pas. La guerre c'est la guerre. L'honneur ultime du pouvoir.

Une maman pourtant.
Les grands les forts les puissants les guerriers peuvent crier autant qu'ils veulent. Et cacher ce qu'ils sont sous des peaux de fureur et d'arrogance. Ils le peuvent. Ils le prouvent. Mais au fond, nous savons tous le prix de ce mot, son bonheur, sa blessure, son ancrage, son essence. Et qui peut dire, des hommes bien construits, savamment représentés, fabriqués à force d'engranger savoirs et expériences, qui peut dire, quand la solitude, la détresse ou la peur cisaille le jour, que ce n'est pas ce mot qui vient les rassurer ? Qui n'a jamais prié, pleuré, murmuré pour la main de sa mère ?

Les mamans de Syrie auront passé ce jour dans la douleur. Aucune pitié pour elles. Pas plus ce jour qu'un autre. La rage est à l'oeuvre. On s'amuse à violer, dénaturer, écarteler, affamer, ravager ce qui est. Et au-delà. Sans faillir. Pour tuer les mères. Vomir la vie.

Chaque jour, j'amène mon fils à l'école. Je l'accompagne à son rythme. Et j'éduque, je partage, pose des jalons, console, m'inquiète, m'émerveille. Et je regarde l'enfant grandir, se construire.
Autour, nos rues sont paisibles.

Les mamans de Syrie sont des mères courage. Parce qu'il n'y a plus d'école. Parce que les tombes des enfants, des maris, des pères déciment les jardins. Parce que l'insulte est le seul horizon. Parce que les foyers, autrefois de chaleur et d'amour, sont de vent, de gravas et de sable aujourd'hui. Parce qu'il faut marcher, affronter l'inconnu, être au-delà de la peur.  Pour les enfants. Pour ceux qu'il faut aider à se construire. Malgré tout, malgré les hommes.

Alors elles veillent, protègent, se battent, fuient s'il le faut et c'est encore se battre.
Et elles avancent dans le silence, héroïnes invisibles. Vaillantes entre toutes.

Mais il n'y aura pas de pause pour elles ce jour-là.
Pas plus ce jour qu'un autre.
Pas de pause pour célébrer la vie qu'elles offrent.

Une maman pourtant.
C'est une affaire sérieuse.
C'est l'affaire d'une vie.
Sans elle, quels matins ?

Marion Coudert

lundi 17 mars 2014

Des graines semées

Voici déjà quelques librairies où vous trouverez Pays, Chroniques d'un Orient fragile et Le Sang du Printemps, un blog pour le peuple syrien

En France



A Bordeaux, 
Librairie La Machine à lire
8, place du Parlement





A Mont-de-Marsan
Librairie Caractères
34, rue Frédéric Bastiat


Signature le jeudi 10 avril 2014 à 19h.
Lecture et médiation avec Carlton Rara





En Belgique




A Bruxelles
Librairie 100 Papiers
Avenue Louis Bertrand, 23
1030 Schaerbeek


Signature le mercredi 2 avril 2014 à 19h et écoute de "Nos Pays"




Vous pouvez aussi commander les livres en envoyant un mail à : editions.ici.la@gmail.com


Et puis répondre ici à ce constat que quelques uns d'entre vous font très justement d'une écriture ralentie dans mon blog. Oui, c'est vrai mon rythme d'écriture y est assez lent depuis un moment. J'ai fait le choix de donner aux textes du Sang du Printemps l'espace d'un livre. C'est un choix pour aller plus encore vers les lecteurs, pour échanger de vive voix autour de la Syrie, pour sensibiliser d'une autre manière, dans une autre forme de présence. Je crois que ces trois années de guerre et de douleurs nous imposent de nous questionner sur ce que nous mettons en oeuvre pour veiller le peuple syrien, sur nos limites et les moyens de les dépasser. C'est en tout cas ainsi que je vois les choses pour moi. Plus que jamais je suis aux côtés de mes amies et amis syriens. 

Le projet de La Caravane Magique pour lequel mes droits d'auteur du Sang du Printemps, un blog pour le peuple syrien sont réservés est une initiative qui me touche beaucoup. Que des jeunes décident de ne pas renoncer, de construire un théâtre mobile et d'inviter les enfants à jouer pour leur donner la possibilité d'un souffle, le droit d'être juste des enfants et de s'exprimer, je trouve cela exemplaire. Utopique sans doute étant donnée la situation mais essentiel, vital, très courageux, chargé d'espoir et à soutenir. N'hésitez pas à aller voir leur projet à ce lien :  http://codssy.org/

Enfin, vous appeler toujours à ne pas vous détourner du peuple syrien et de ses enfants, à penser à eux, à les veiller dans vos pensées et dans vos tendresses.

Marion Coudert


samedi 8 mars 2014

Le 15 mars 2014 en Syrie

Le 15 mars 2014 en Syrie, cela fera 1095 jours de répression, de massacres, de bombardements, de sièges, de tortures, de viols, de meurtres d'enfants, d'assassinats délibérés, d'enlèvements, d'emprisonnements arbitraires, de famines orchestrées, d'exils contraints. 
1095 jours de ravages et de destructions méthodiques. 
1095 jours de sauvagerie et de terreur.
1095 d'appels à l'aide sans réponse.
1095 jours de mensonge et de cécité.
Le 15 mars 2014, cela fera 1095 jours que nous acceptons, que nous nous taisons, que nous nous détournons. 
Là où vous êtes ce jour-là, n'acceptez pas, ne vous taisez plus, ne vous détournez pas. 


mardi 4 mars 2014

Parution de " Le Sang du Printemps, un blog pour le peuple syrien", éditions Ici&Là, 12 mars 2014 !


Le sang du Printemps, un blog pour le peuple syrien reprend les chemins inscrits dans ce blog depuis janvier 2012. 
Les textes choisis y sont regroupés en fonction des questions et des pensées qui ont été les miennes depuis trois ans et accompagnés de textes qui les introduisent.
Extrait : "Ce livre (...) répète sur une même partition imposée, les mots de l’urgence. Il y a du vertige, de la nausée à s’y engouffrer. Pourquoi les taire ? Pas d’esthétique à chercher dans le sang. Partager la traversée. C’est tout. Et chercher, continuer à tenter de débusquer les mots qui pourraient nous sauver. S’ils existent, où sont-ils ? Quels chemins ? Il n’y a pas de réponse. Il n’y a que deux questions, celle de l’abandon et celle de l’espoir."


L'intégralité de mes droits d'auteur sera reversée pour le très beau et si nécessaire projet de la Caravane Magique :

 

"La Caravane Magique" se consacre aux travaux de divertissement, de formation et d’éducation des enfants « déracinés » de la ville de Saraqeb et de ses environs, dans la province d’Idlib au Nord-Ouest de la Syrie. L’équipe de la Caravane Magique souhaite élargir ses activités avec l’ajout d’un théâtre mobile. Le théâtre permettra à la Caravane d’offrir des cours de théâtre interactifs avec les enfants des environs et de réaliser deux spectacles avec la participation des enfants dans la province d’Idlib et Alep.   
La Caravane Magique est soutenue par CODSSY dont voici le lien pour lire sur ce projet plus en détail et pour prendre connaissance des autres projets que vous pouvez soutenir :  http://codssy.org/


Vente de l'ouvrage :


Première vente  :  le 13 mars 2014 à 18h00 au Cinéma de Sabres dans les Landes dans le cadre de l'écoute de Nos Pays.  

 

En Belgique, Bruxelles, Librairie 100 Papiers, 2 ou 3 avril 2014 à 19h00 (précision à venir) : 

Signature pour Pays, Chroniques d'un Orient fragile et Le sang du Printemps, un blog pour le peuple syrien et écoute de Nos Pays. Les ouvrages y seront en vente dès le 20 mars.

 

La liste des librairies et signatures en France sera précisée dans quelques jours. 

 

Et vous pouvez commander Le sang du Printemps, un blog pour le peuple syrien par mail : editions.ici.la@gmail.com



samedi 1 mars 2014

Le 10 mars à 22h sur la RTBF Première

Nos Pays est à écouter dans l'émission de Pascale Tison Par Ouï Dire.
Nos Pays voyage dans les textes de Pays, Chroniques d'un Orient fragile et ceux de ce blog, Le Sang du Printemps. Voyage donc, qui traverse les guerres et les lumières de nos pays qui, d'Orient et d'Occident, et quoique l'on en dise, nous relient les uns aux autres et nous ramènent toujours à ce seul pays que nous devons défendre, celui de notre humanité commune. Dans les encres sonores de cette création, la poésie se fait chemin pour que des rives de l'Atlantique à celles de la Méditerranée, un autre langage s'invente. Et c'est un hommage pour mes amis syriens, pour que l'oubli ne les avale pas...



samedi 15 février 2014

"Pays, chroniques d'un Orient fragile" vient de paraître !

Voici Pays, chroniques d'un Orient fragile, le premier ouvrage des éditions Ici&Là ! Il sera bientôt en vente en librairie (liste à venir très bientôt) mais vous pouvez déjà le commander en envoyant un mail là : editions.ici.la@gmail.com



mardi 11 février 2014

Syrie : quelques pistes pour mieux s'y retrouver


©M. Coudert


Si vous souhaitez dépasser le stade des informations "traditionnelles" et aller un peu plus loin pour mieux comprendre la situation en Syrie ou mieux connaître le peuple syrien, vous trouverez ici quelques pistes de sites en français, hors FB et réseaux sociaux. La liste n'est pas exhaustive bien entendue, mais c'est une base pour mieux orienter vos recherches : 



Sites politiques et/ou d'information :

Site du chercheur et politologue libanais Ziad Majed. Vous pourrez y lire "des articles et des analyses sur les réformes, les transitions démocratiques, les élections, la société civile et la citoyenneté au Liban, en Syrie et dans le monde arabe."

Site du groupe de soutien à la révolte du peuple syrien. Vous y trouverez des analyses politiques, des informations sur la situation en Syrie ainsi que des informations sur les actions menées ensoutien au peuple syrien en France et en Europe.

Blog d'Ignace Leverrier, ancien diplomate. Études sur la Syrie et revue commentée de l'actualité syrienne.


Sites culturels et/ou de réflexion : 

http://www.ilasouria.org/ 
Site de l''association Ila Souria. Ila Souria a pour objet "l'organisation d'événements pour la reconstruction de la Syrie : colloques internationaux multidisciplinaires ; événementiels divers ; ateliers d’échanges et de créations avec des professionnels, des chercheurs, des enseignants, des étudiants ; expositions et installations artistiques ; éditions et publications des journaux et ouvrages de ces différentes manifestations. Elle est composée essentiellement de chercheurs, universitaires scientifiques, professionnels, syriens, franco-syriens et français qui désirent oeuvrer pour une Syrie libre, démocratique et laïque." 

http://syriecult.hypotheses.org/
Site dont l'objectif est de "valoriser et promouvoir la richesse et la diversité de la culture syrienne dans toutes ses expressions matérielles et immatérielles, par le partage de travaux et d’expériences multiples. Les informations véhiculées par le carnet ont une perspective humaniste, traduite sous forme d’articles de recherche et de synthèse sur des travaux anciens ou récents, mais elles ont aussi pour but de rendre compte des différents acteurs de la société syrienne qui participe à construire un patrimoine culturel extrêmement riche."

http://lamaisondelasyrie.com/
Site canadien francophone dont l'objectif est un hommage à la culture syrienne d'hier et d'aujourd'hui. Vous y trouverez des pistes de lectures, découvrirez des photographes et des artistes et des points sur le patrimoine, l'art culinaire syrien etc...

http://www.unesco.org/new/fr/culture/themes/illicit-traffic-of-cultural-property/emergency-actions/syria/
Sur le site de l'Unesco, vous trouverez des articles rendant compte de la situation quant au patrimoine syrien.


Sites à vocation humanitaire : 

http://codssy.org/
"CODSSY est une association humanitaire à but non-lucratif, indépendante, non-partisane et non-gouvernementale. CODSSY a pour mission d’apporter une aide d’urgence aux victimes du conflit syrien et à leurs familles quelques soient leurs origines ethnique, confessionnelle et socio-économique. L'association regroupe une dizaine d’associations syriennes issues de la société civile."

http://www.alwanelyon.com/
"Alwane a pour vocation de venir en aide aux enfants victimes de la violence en Syrie, de sensibiliser et d'informer sur les droits de l'homme en Syrie par le biais de projets culturels, éducatifs et socio-culturels. Alwane intervient au Liban et en Syrie pour des projets spécifiques et ciblés."

http://www.comsyr57.org/
"Créé à Metz en octobre 2012, le Comité d'Aide humanitaire au Peuple syrien, apolitique et non confessionnel, a pour objectif prioritaire l'organisation d'actions de secours médicaux à la population en formant des secouristes et des médecins sur place ; ces actions s'appuient sur le projet «Centre de formation » porté par le professeur PITTI, médecin urgentiste."

http://www.syriemdl.net/
"Un des principaux objectifs de l’association Syrie moderne démocratique laïque est la promotion de la culture syrienne et le renforcement des liens d’amitié et de solidarité entre le peuple syrien et les autres peuples. Elle mène seule ou en partenariat avec d’autres associations et ONG des opérations d’aide humanitaire."


Sites artistiques :

http://www.creativememory.org
La mémoire créative de la révolutions syrienne est un site très complet et très riche qui a pour objectif "de regrouper toutes les formes d’expression intellectuelle et artistique produites pendant la révolution et de soutenir la résistance artistique syrienne, de renforcer sa place et de diffuser son message, et d’aider à la mise en réseau de ses acteurs, qu’ils soient des personnes ou des groupes, aussi bien entre eux qu’avec le reste du monde solidaire."

http://www.wissamaljazairy.daportfolio.com/
Site de l'artiste syrien Wissan al Jazairy

http://ahmadali.net/
Site du photographe syrien Dino Ahmad Ali


Artistes syriens :
Diaporama de quelques oeuvres d'artistes syriens que j'aime glanées sur FB :



Et un inclassable :

http://www.messagetosyria.com/
A voir absolument ! Je vous invite à visiter ce site, fruit d'une merveilleuse initiative qui "s’adresse aux citoyens du monde comme un échange" et dont l'idée est de "recevoir des visages et des mots de Syrie, qui remettent l’humain au centre de l’Histoire et montre une part de l’âme de la Syrie. Pour, en retour, adresser un message pour répondre à cet appel répété : « Monde, Humanité, où êtes-vous ? »."



Marion Coudert

samedi 8 février 2014

N'empêche...

On peut se situer à tous les niveaux que l'on veut. N'empêche. Un enfant syrien qui meurt sous les coups d'une trop grande violence, qu'elle vienne du ciel, d'un ventre qui crie famine ou d'une peau gavée de coups, c'est un enfant qui meurt sous ces coups-là.
 
On pourra prétexter que c'est pareil ailleurs, qu'il y a d'autres enfants. Invoquer les passés récents, rajouter du concept d'universalité, de récurrence de l'histoire. N'empêche.  Un enfant syrien qui meurt sous les coups d'une trop grande violence, qu'elle vienne du ciel, d'un ventre qui crie famine ou d'une peau gavée de trop de coups, c'est un enfant qui meurt sous ces coups-là. 
 
On pourra même se tartiner les plannings de colloques, de réunions au sommet, de conférences vénéneuses et de communiqués bien pensants. N'empêche. Un enfant syrien qui meurt sous les coups d'une trop grande violence, qu'elle vienne du ciel, d'un ventre qui crie famine ou d'une peau gavée de trop de coups, c'est un enfant qui meurt sous ces coups-là.
 
Et on peut encore, si le coeur nous en dit, penser qu'on a déjà assez à faire ici. Qu'on ne regarde pas ou plus. Autour de nous, sur nos trottoirs et dans nos villes. Que balayer d'abord devant sa porte... N'empêche. Un enfant syrien qui meurt sous les coups d'une trop grande violence, qu'elle vienne du ciel, d'un ventre qui crie famine ou d'une peau gavée de trop de coups, c'est un enfant qui meurt sous ces coups-là.
 
Il y a une autre option qui consisterait à faire l'inverse. 
De la douceur pour les enfants de Syrie. 
Mais n'empêche....
 
Marion Coudert.
 

vendredi 7 février 2014

S'il n'y a que la laideur....



Il y a quelques temps, j'étais assise à côté d'une personne syrienne qui parlait à d'autres de son pays. Elle en disait la laideur. Elle n'en disait que la laideur et la corruption et insistait sur le fait que les artistes, jeunes et moins jeunes, jeunes surtout, qui défendaient avec leurs oeuvres la révolution, étaient, pour la plupart d'entre eux en exil, et qu'ils constituaient un élément marginal, insignifiant de l'histoire actuelle de la Syrie. A l'écouter, nous avions le devoir d'être réalistes et de laisser définitivement de côté toute vision définie, à ses yeux, comme romantique, naïve, fausse.

En 2012, Nicolas et moi avons tenté un appel à financement participatif pour notre ouvrage "Le Chant des norias, un chant pour le peuple syrien". C'est un livre qui rend hommage aux belles roues, à leurs mouvements de vie et une pensée pour le peuple syrien avec l'espoir de la paix pour lui. Nous n'avons pas abouti à cette époque, mais nous publions ce livre aux éditions Ici&Là au printemps 2014. Lors de cet appel, j'avais reçu des courriers de personnes qui m'indiquaient qu'il était indécent de parler d'un élément patrimonial syrien alors que tant de gens mouraient et souffraient. Je suis heureuse de constater aujourd'hui qu'il y a un vrai mouvement de réflexion et de soutien autour du patrimoine syrien. L'idée a donc fait son chemin que le patrimoine est une mémoire précieuse, qu'il est le socle sur lequel ce qui est détruit pourra se reconstruire. Et ce, bien au-delà de la pierre, jusque dans le coeur d'une identité que certains n'ont de cesse de briser, broyer, annuler.
Ainsi donc, il est désormais convenu que le patrimoine, les paysages, les coutumes, la beauté de la terre de Syrie sont une force. Et peut-être aussi le chemin pour une bataille déjà remportée sur un adversaire qui s'acharne d'autant plus qu'il sait parfaitement que ce qui est en jeu c'est justement cette identité, la fierté d'une histoire, la poésie d'une langue, une façon d'être et de concevoir le monde, la société, la vie, l'humain. Et plus il détruit, plus il enrage de voir que tout cet héritage, bien souvent négligé ou peu regardé avant la révolution, est aujourd'hui connu, reconnu, aimé, défendu. D'autant plus.

Je voudrais dire à cette personne qui ne voit que du laid dans tout ce qui se rapporte à la Syrie, qu'elle a raison, que tout est laid aujourd'hui. Et que l'on touche au plus laid, au plus sale de l'humain à torturer des enfants, à faire mourir les gens de faim, volontairement, à emprisonner, enlever, détruire, détruire, détruire.

Mais je voudrais aussi lui dire qu'elle a tort, que le seul réalisme à avoir est la conscience que nous sommes loin de la Syrie, protégés, au chaud, nourris, sereins. Et que la seule attitude qui prévaut est l'humilité dans tout ce que nous tentons pour la Syrie. Et la conscience que ce que nous faisons individuellement n'est rien, ne peut rien face à la folie de destruction et de haine qui en cours. Cependant, quoique nous fassions, nous sommes responsables des images que nous véhiculons de la Syrie. N'évoquer que la laideur revient à nier l'existence de tous ceux qui sont en prison, disparus, torturés, morts, en exil  parce qu'ils se sont levés pour proposer un autre chemin pour leur pays.

Et je voudrais encore lui dire qu'elle se trompe, qu'il vaut mieux préférer cette naïveté et même la choisir en toute lucidité. C'est sans doute la voie qu'emprunte Tammam Azzam, cet artiste syrien qui ne se tait pas et continue à imaginer, réagir, contester. Et à nous interpeller, à nous garder sur les chemins de l'intranquillité.
C'est sans doute aussi la voie de tous les artistes syriens et de chacun de ceux qui luttent, à leur mesure, avec leurs moyens, pour que la Syrie prenne un jour le chemin de la liberté, de la tolérance et de la justice.

Sans cette vision délibérée du présent, il n'y a plus d'espoir possible.
Sans cette confiance volontaire, le cynisme est la seule alternative.
Sans cette posture assumée, tout souhait de solidarité est vain.
Sans cette naïve folie, alors tout est perdu.

Marion Coudert

Légende des images :
1- Oeuvre de l'artiste syrien Tammam Azzam. (http://www.lorientlejour.com/article/850121/tammam-azzam-a-la-galerie-ayyam.html)
2- Camp palestinien de Yarmouk au sud de damas où l'on meurt de faim aujourd'hui. 


mercredi 29 janvier 2014

Une histoire...

C'est l'histoire d'une terre et d'un peuple.
Belle terre et beau peuple. Nobles tous les deux.

C'est une histoire triste. Elle mêle la colère, le défi et l'impuissance. Elle sillonne au milieu des charniers, des tortures, des visages sans nom et des noces de sang que quelques uns ne cessent de fêter.

C'est une histoire triste oui. Il y est question d'identité, de rage à la défendre, de frontières intérieures, inavouables, inexcusables aujourd'hui, après tant de morts, tant de douleurs, tant de pertes.

C'est une histoire difficile. Elle contient des milliers d'histoires déchirées, prisonnières de volontés brutales. C'est une histoire de vies privées de vie, une histoire de déni, de refus de l'autre, de son humanité.

Et c'est une histoire sale qui traîne, comme une rengaine obsolète, l'idée que le pouvoir est le seul chemin valable pour être. Dans le plus sale de l'humain. C'est l'histoire d'une descente dans le plus sale de l'humain. Dans la sauvagerie, dans l'abandon, la lâcheté, tous les vices. Et le mensonge pour ne plus s'arrêter. 

On peut se détourner. Peut-être même le doit-on pour se sauver de ces tristesses, de ce dégoût qui colle à chaque image venant de Syrie désormais. Ce désespoir hémorragique, cette récurrence obscène des stratégies du mal, de la gloire du médiocre, du règne de la force.

Mais moi, je ne veux pas me détourner. Parce que je sais que c'est l'histoire d'une terre et d'un peuple. Nobles tous les deux. Belle terre et beau peuple. 
Et que c'est une belle histoire. Une histoire de courages et de dignités. Une histoire essentielle qui questionne chacun d'entre nous sur notre intime lien à la fraternité, au respect, à la tolérance, au pouvoir, à la vanité.
Et à l'espoir. La force de l'espoir.

C'est l'histoire d'une révolution.
C'est une histoire qui commence.

Marion Coudert.

mercredi 1 janvier 2014

Une année blanche


Je souhaite une année blanche. Et du temps pour soigner, apaiser. Du temps pour enlacer. Que la parole reprenne sa place. Et un pas. Un pas de géant vers ces appels qui restent sans réponse et qui sont d'une insondable tristesse. Et que nous puissions prendre le temps d'accompagner dans nos silences les amis chers qui manquent à l'appel. Que parents et enfants puissent reprendre souffle hors des distances, hors des exils. Et que les mains se touchent à nouveau.

Je voudrais une année légère. Que des matins heureux se lèvent  sur les terres que l'on aime. Et que les paysages ne pleurent plus de ces blessures ancrées qui nous dévastent.

Je voudrais une année d'horizons. Une année franche, une année claire. Que les possibles entaillent les ténèbres, qu'ils ouvrent la voie des sagesses. Une levée de fraternités. Pouvoir épeler les lettres du mot Syrie avec de l'espoir dans le coeur. Reprendre les chemins vers les jardins, vers les roues, vers la vie. Et que l'on abandonne la ronde des cynismes et des lâchetés. Une levée de fraternités. Vraie. Simple et sans ornements. Juste parce que nous sommes des êtres humains sur une même terre, dans un même voyage. Sans rien d'autre à gagner de plus que de nous reconnaître.

Et je fais le voeu très cher d'une année de douceurs. Toutes les douceurs. Les plus insignifiantes, même les simplement polies, même les superflues. De la douceur pour les enfants de Syrie. Les protéger, les aimer plus encore, les accompagner. Sans ménager nos efforts. Et les défendre. Contre les loups. Les enragés. Tous les hors la vie.

Et gagner.

Marion Coudert

mardi 17 décembre 2013

Quelles que soient vos bannières

Nicolas T. Camoisson
Ô mes amis, frères et soeurs en humanité, quelles que soient vos couleurs et vos bannières, ne laissez pas le peuple de Syrie mourir à votre porte.

Vous êtes pères, vous êtes mères. Vous savez la fragilité de l'enfance, ces années où l'on forge son coeur et son regard. Refusez que les enfants de Syrie meurent de faim, de froid, de terreur. Ils ont déjà tant souffert, tant perdu, tant marché, tant espéré. 

Levez-vous. Quittez vos manteaux de stratèges. Ôtez vos peaux d'indifférences. Parlez pour eux. Pleurez pour eux. Espérez pour eux.

Ô mes amis, frères et soeurs en humanité, n'ayez pas peur du peuple de Syrie. Tant de liens nous unissent et nous sommes si proches en vérité. Ils ont déjà tant traversé pour ce seul mot de "liberté", si chèrement payé, si dignement défendu.

Levez-vous. Accueillez-les dans vos pensées, dans vos tendresses. Ne vous détournez pas du peuple de Syrie, de son courage, de son immense douleur. Quittez la chaleur solitaire de vos foyers pour celle, bienfaisante, des places où l'on est solidaire. Ne laissez pas se perdre ce qui nous garde humains. Refusez d'accepter que l'on vous dicte de vous détourner d'eux. Refusez d'accepter la fin de la fraternité. Refusez d'accepter le cynisme des décomptes des morts, des réfugiés, des massacres au TNT, au sarin, à l'arme blanche, à coup de famines organisées, à coup de terreurs volontaires. Élevez votre voix contre les enlèvements sans fin, les viols, les tortures, toutes les maltraitances. Dénoncez les silences imposés à tous ces jeunes qui se battent pour que le mot "humain" s'irrigue de tolérance et de justice. Refusez de ne voir en ces enfants, ces femmes et ces hommes que des étrangers lointains qui traversent une guerre. Une guerre qui ne serait qu'une guerre de plus. Refusez de mourir de la mort insidieuse qui ronge nos cités, ce cancer d'égoïsmes et de peurs qui dévaste nos âmes.

Ô mes amis, frères et soeurs en humanité, retrouvez le chemin de vos coeurs, levez-vous. Ne laissez pas mourir le peuple de Syrie à votre seuil. Tenez-vous debout pour ces enfants. Construisez demain avec eux. Ô mes amis, ne laissez pas mourir l'humain en vous.

Marion Coudert

lundi 16 décembre 2013

J'aurais aimé rencontrer Razan Zaitouneh

Vieux monsieur de Hama - Syrie- © Nicolas T. Camoisson
J'aurais aimé rencontrer Razan Zaitouneh, cette merveilleuse jeune femme, avocate d'à peine 36 ans, courageuse entre toutes. J'aurais aimé sentir la chaleur de sa voix, sa détermination. Et l'écouter, apprendre d'elle ce qu'est la dignité, la foi en l'homme envers et contre tout. Elle est restée sur sa terre meurtrie, Razan Zaitouneh,   aux côtés de son peuple. Elle s'est battue sans relâche pour faire entendre une voix qui serait du côté de l'humain, du côté du droit, de la justice, de la tolérance. Elle a tenu bon, forçant la lumière dans les couloirs de l'ombre, posant un pas après l'autre, sans renoncer. Jamais. J'aurais aimé éclairer ma voix de la sienne.

Mais ce 10 décembre 2013, des hommes cagoulés sont venus l'enlever.

Tristement, la liste aux contours de terreurs inaudibles se rallonge de son nom. Et celui de Wael Hamade. Et Samera Al-Khalil. Et Nazem Al-Hamadi. Et Feras Al Haj Saleh. Et Paolo Dall'Oglio. Et tous ceux dont je ne sais ni les combats ni les souffrances ni les courages. Tous, oeuvrant pour un monde plus digne. Tous, debout pour une vision de l'humain qui devrait être la nôtre. Et ceux, plus anonymes, qui n'en sont pas moins braves. Tous ceux qui avancent, posant, eux aussi, un pas après l'autre pour que le jour qui vient ne soit pas broyé, saccagé par les hommes vautours. Ces hommes qui ne prennent plus le chemin de l'humain.

Quelle traversée pour tous ces courageux, ces vaillants ? Sur quel chemin d'humiliation, d'insulte, de violence, de torture se trouvent-ils ?

Nous, sur nos rives trop pleines, nous avons perdu les ancrages essentiels. Nous inscrivons des noms sur des plaques aux angles de nos rues. Des noms qui nous rassurent. Stephan Hessel, Mandela... Nous inaugurons des places, décernons des prix, noyons pompeusement nos lâchetés en des cérémonies très officielles. Et nous sombrons de plaisir dans les abîmes de nos certitudes.

Aucune image qui viendrait de nos terres pour les accompagner.
Nous ne savons pas, plus, leur demander pardon, leur dire merci, nous tenir, humbles et fraternels, à leurs côtés.
Eux qui se battent et souffrent avec la grâce de l'humanité vraie.
Eux qui, depuis le fond de l'ombre où on les a piégés, nous illuminent pourtant d'une lumière si intense et si claire.

Mais il y a ce sourire, le regard bienveillant de ce vieil Hamaouite, cet homme de chez eux.
Et ces roses dans ses mains pour leur dire merci.
Merci.

Marion Coudert

jeudi 12 décembre 2013

A mes amis français

Nous pouvons considérer que ce qui se passe en Syrie est trop compliqué, qu'il y a des loups d'un côté, des loups de l'autre. Soit.
Nous pouvons convenir que l'aide humanitaire n'arrive pas forcément là où elle devrait et que la corruption est à l'oeuvre. Soit.
Nous pouvons estimer que ce sont les institutions internationales qui ne font pas ce qu'elles ont à faire et nous retrancher derrière ces vérités-là. Soit.
Nous pouvons observer qu'il est bien difficile, quand on n'est pas syrien, de rester en solidarité, tant les esprits de nombre de ceux qui défendent le peuple syrien en Europe sont fermés et tourmentés. Soit.
Nous pouvons même nous sentir lointains, étrangers des Syriens et rétorquer que nous ne pouvons pas venir en aide au monde entier. Soit.
Mais ça non. Ces enfants qui meurent de froid. Ne rien faire, ne pas voir, ne pas agir, c'est indigne.
Nous n'avons pas le droit.

Enfant syrien réfugié. Vallée Bekaa/Liban. Source Courtesy : fb

Enfant syrien réfugié. Source Nino Fezza : fb

Camp d'Irsal/Liban. Source Nino Fezza : fb
Marion Coudert

mercredi 11 décembre 2013

Bout de chiffon

Petite fille de Hama - Syrie 2007. ©Nicolas T. Camoisson
Relire la déclaration des droits de l'enfant sous la sombre lumière de l'enfance syrienne d'aujourd'hui : 

Principe 1
"L’enfant doit jouir de tous les droits énoncés dans la présente Déclaration. Ces droits doivent être reconnus à tous les enfants sans exception aucune, et sans distinction ou discrimination fondées sur la race, la couleur, le sexe, la langue, la religion, les opinions politiques ou autres, l’origine nationale ou sociale, la fortune, la naissance, ou sur toute autre situation, que celle-ci s’applique à l’enfant lui-même ou à sa famille."

Enfants de Syrie. Ils sont plus de 11 000 à avoir trouvé la mort du fait de leur appartenance à une classe sociale, une communauté religieuse ou à une famille qui s'est levée pour la liberté. La mort qui les cerne sans relâche annule le principe premier.

Principe 2
"L’enfant doit bénéficier d’une protection spéciale et se voir accorder des possibilités et des facilités par l’effet de la loi et par d’autres moyens, afin d’être en mesure de se développer d’une façon saine et normale sur le plan physique, intellectuel, moral, spirituel et social, dans des conditions de liberté et de dignité. Dans l’adoption de lois à cette fin, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être la considération déterminante."

Enfants de Syrie. De la liberté et de la dignité qui leur sont dues, ils ne connaissent que les armes blanches et les tirs des snipers, le gaz sarin et les bombardements. La violence qui leur est faite annule le principe 2.

Principe 3
"L’enfant a droit, dès sa naissance, à un nom et à une nationalité."

Enfants de Syrie. Ils apprennent aujourd'hui que leur nom est un danger et que leur nationalité les rend invisibles aux yeux du monde. Ils sont des milliers sur les routes indignes de l'exil. Le mépris qui écrase leur identité annule le principe 3.

Principe 4
"L’enfant doit bénéficier de la sécurité sociale, il doit pouvoir grandir et se développer d’une façon saine; à cette fin, une aide et une protection spéciales doivent lui être assurées ainsi qu’à sa mère, notamment des soins prénatals et postnatals adéquats. L’enfant a droit à une alimentation, à un logement, à des loisirs et à des soins médicaux adéquats."

Enfants de Syrie. Dans les prisons du pays, la réponse qui leur est donnée est une traversée de la torture. Les prisons ne sont pas des maisons pour ces enfants aux mains de goêliers qui s'amusent avec eux. La souffrance acceptée de ces enfants annule le principe 4. 


Principe 5
"L’enfant physiquement, mentalement ou socialement désavantagé doit recevoir le traitement, l’éducation et les soins spéciaux que nécessite son état ou sa situation."

Enfants de Syrie. Ceux, tout petits, fragiles encore, qui passent seuls, à pied, les frontières. Ceux qui ont vu ce qui est interdit, ce qui n'est plus humain, ce qui n'est que haine et rage. Tous ceux-là sont blessés à l'âme. La non assistance à ces enfants annule le principe 5. 

Principe 6
"L’enfant, pour l’épanouissement harmonieux de sa personnalité, a besoin d’amour et de compréhension. Il doit, autant que possible, grandir sous la sauvegarde et sous la responsabilité de ses parents et, en tout état de cause, dans une atmosphère d’affection et de sécurité morale et matérielle; l’enfant en bas âge ne doit pas, sauf circonstances exceptionnelles, être séparé de sa mère. La société et les pouvoirs publics ont le devoir de prendre un soin particulier des enfants sans famille ou de ceux qui n’ont pas de moyens d’existence suffisants. Il est souhaitable que soient accordées aux familles nombreuses des allocations de l’État ou autres pour l’entretien des enfants."

Enfants de Syrie. Dans les camps de l'exil, ils se battent contre toutes les discriminations, contre une vie réduite à la survie. Ils sont enfants de second plan pour les pays voisins et ceux d'Europe qui ne les accueillent que contraints. La maltraitance qu'ils subissent annule le  principe 6.


Principe 7
"L’enfant a droit à une éducation qui doit être gratuite et obligatoire au moins aux niveaux élémentaires. Il doit bénéficier d’une éducation qui contribue à sa culture générale et lui permette, dans des conditions d’égalité de chances, de développer ses facultés, son jugement personnel et son sens des responsabilités morales et sociales, et de devenir un membre utile de la société.
L’intérêt supérieur de l’enfant doit être le guide de ceux qui ont la responsabilité de son éducation et de son orientation; cette responsabilité incombe en priorité à ses parents.
L’enfant doit avoir toutes possibilités de se livrer à des jeux et à des activités récréatives, qui doivent être orientés vers les fins visées par l’éducation; la société et les pouvoirs publics doivent s’efforcer de favoriser la jouissance de ce droit."

Enfants de Syrie. Leurs écoles de Syrie sont dévastées, occupées, ravagées. A l'intérieur comme dans les pays voisins, la seule école qui prévaut est celle de la rue. Ils n'y apprennent qu'à survivre. Le refus de soin et d'accompagnement de ces enfants annule le principe 7.

Principe 8
"L’enfant doit, en toutes circonstances, être parmi les premiers à recevoir protection et secours."

Enfants de Syrie. C'est le troisième hiver qu'ils traversent. Ils dorment, pour beaucoup, à même la neige. Ils manquent de tout et de l'essentiel. L'abandon de ces enfants annule le principe 8.

Principe 9
"L’enfant doit être protégé contre toute forme de négligence, de cruauté et d’exploitation, il ne doit pas être soumis à la traite, sous quelque forme que ce soit.
L’enfant ne doit pas être admis à l’emploi avant d’avoir atteint un âge minimum approprié; il ne doit en aucun cas être astreint ou autorisé à prendre une occupation ou un emploi qui nuise à sa santé ou à son éducation, ou qui entrave son développement physique, mental ou moral."

Enfants de Syrie. Ils meurent de faim aujourd'hui. Leur histoire est une succession de fuites et de peurs. Ils travaillent comme ils peuvent, là où ils peuvent. Ils sont exploités, sans défense. La protection qui leur est refusée annule le principe 9.


Principe 10
"L’enfant doit être protégé contre les pratiques qui peuvent pousser à la discrimination raciale, à la discrimination religieuse ou à toute autre forme de discrimination. Il doit être élevé dans un esprit de compréhension, de tolérance, d’amitié entre les peuples, de paix et de fraternité universelle, et dans le sentiment qu’il lui appartient de consacrer son énergie et ses talents au service de ses semblables."

Enfants de Syrie. Ils sont seuls. Ils meurent sous les coups répétés des tortures, de la maltraitance, du froid et de la famine imposés. Ils meurent de douleur et d'abandon. Ils meurent de nos silences et de nos égoïsmes. Le refus de l'amitié pour les enfants de ce peuple annule le principe 10.

La déclaration des droits de l'enfant, sous la lumière sombre de l'enfance syrienne d'aujourd'hui, est un bout de chiffon....


Marion Coudert